Publié le 22/05/2025 - Article rédigé pour Batiactu par Rai d'Action
URSSAF et DREETS : rôles, missions et différences
Les contrôles menés dans le secteur du bâtiment ne relèvent pas tous du même organisme, car l’
URSSAF et la
DREETS n’interviennent pas pour les mêmes raisons ni avec les mêmes objectifs. Bien les différencier permet de mieux comprendre le type de vérifications auxquelles une entreprise peut être confrontée.
L’URSSAF : le gardien des cotisations sociales
L’
Union de Recouvrement pour la Sécurité Sociale et les Allocations Familiales (URSSAF) a pour mission principale de collecter les cotisations sociales des employeurs et travailleurs indépendants. Elle veille également à la bonne application de la législation sociale, notamment en matière de travail dissimulé.
Les contrôles de l’URSSAF portent essentiellement sur :
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La régularité des déclarations sociales (DSN),
-
Le paiement des cotisations et contributions sociales,
-
L’existence d’éventuelles dissimulations d’activité ou d’emploi,
-
Les avantages en nature ou frais professionnels déclarés.
Un contrôle URSSAF vise donc à s’assurer que les déclarations sociales sont exactes, complètes et conformes aux règles en vigueur.
La DREETS : un contrôle axé sur le droit du travail
La
Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DREETS), anciennement DIRECCTE, dépend du ministère du Travail. Ses inspecteurs interviennent pour contrôler l’application du
droit du travail dans les entreprises.
Cela inclut notamment :
-
Le respect des contrats de travail et des durées légales,
-
La sécurité et la santé sur les chantiers,
-
L’affichage obligatoire et le règlement intérieur,
-
La situation des travailleurs étrangers,
-
Le respect des règles de sous-traitance, notamment en matière de lutte contre le travail illégal.
Dans le bâtiment, les contrôles de la DREETS peuvent également concerner les conditions de travail sur les chantiers, la prévention des accidents ou encore la conformité en matière d’hygiène et de sécurité.
Deux approches complémentaires
Si l’URSSAF s’intéresse surtout aux
aspects financiers et déclaratifs, la DREETS agit davantage sur le
terrain des conditions de travail et des droits des salariés. Il arrive toutefois que leurs actions soient coordonnées, notamment dans les cas de travail dissimulé, de fraude ou de non-respect du détachement de travailleurs étrangers.
Dans tous les cas, il est important de ne pas minimiser un contrôle, quel que soit l’organisme concerné. Chacun peut déboucher sur des suites administratives ou pénales, selon la gravité des constats réalisés.
Les différents types de contrôles
Connaître les différents types de contrôles prodigués par la DREETS ou l’URSSAF permet de mieux anticiper les modalités d’intervention et de se préparer en conséquence.
Contrôle inopiné ou programmé : deux approches possibles
Le contrôle programmé est le cas le plus courant. L’entreprise reçoit un
avis de contrôle précisant la période concernée et la date de l’intervention. Ce délai permet de rassembler les documents demandés et de solliciter, si besoin, un accompagnement (expert-comptable, juriste…).
Plus rare mais potentiellement plus déstabilisant, le contrôle inopiné peut se produire
sans avertissement préalable. Ce type de contrôle est souvent motivé par un signalement ou des soupçons de non-conformité, en particulier en matière de travail dissimulé ou de sécurité sur les chantiers. Il est fréquemment pratiqué par les agents de la DREETS, notamment sur le terrain.
Contrôle sur pièces ou sur place
Il est important de distinguer le contrôle sur pièces et le contrôle sur place :
-
Contrôle sur pièces
-
Ce type de contrôle se fait à distance, à partir des documents transmis par l’entreprise. Il concerne généralement les petites structures ou les vérifications de cohérence administrative (ex. : correspondance entre les déclarations et les paiements de cotisations).
-
Contrôle sur place
-
Plus complet, il implique la présence du contrôleur dans les locaux de l’entreprise, voire directement sur les chantiers. Il peut inclure des entretiens avec les salariés, la vérification de l’affichage obligatoire, ou encore l’inspection des conditions de sécurité.
Contrôles ciblés ou aléatoires
Une dénonciation anonyme, un conflit avec un salarié ou une anomalie repérée dans les déclarations peut déclencher un contrôle ciblé. L’organisme vérifie alors des points précis sur la base d’un
motif identifié.
Certains secteurs font l’objet de
campagnes de contrôle ciblées, notamment dans le bâtiment, où les risques de travail dissimulé, de sous-traitance non conforme ou de non-respect des normes de sécurité sont plus élevés. Dans ce cas, la sélection des entreprises contrôlées peut être partiellement aléatoire ou issue d’un ciblage statistique.
Quel que soit le type de contrôle, l’entreprise est tenue de
coopérer. Un refus ou une obstruction peut être lourdement sanctionné. Il est donc toujours préférable d’aborder le contrôle de manière constructive, en préparant en amont une organisation claire et rigoureuse des documents et obligations légales.
Le déroulement d’un contrôle : étape par étape
Un contrôle URSSAF ou DREETS suit une procédure bien encadrée, qui respecte des étapes précises. Comprendre ce déroulé permet de mieux se préparer et de réagir de manière adaptée tout au long de la procédure.
Étape |
Description |
1. Réception de l’avis de contrôle (si contrôle programmé) |
L’entreprise reçoit un courrier recommandé précisant :
- La période contrôlée
- La date de début
- L’identité du contrôleur
- Les documents à préparer
En cas de contrôle inopiné, aucun préavis n’est donné. |
2. Premier contact avec le contrôleur |
Le contrôleur se présente, expose le cadre de sa mission, demande des informations générales. Présentation de sa carte professionnelle et échange sur l’organisation de l’entreprise. |
3. Phase d’investigation |
Le contrôleur :
- Analyse des documents transmis (contrats, paie, URSSAF…)
- Consulte les registres obligatoires
- Vérifie les pratiques de sous-traitance
- Interroge des salariés
- Peut visiter un chantier |
4. Période contradictoire |
En cas d’anomalie :
- Envoi d’observations à l’entreprise
- Délai pour répondre (souvent 30 jours)
- Possibilité de fournir des justificatifs ou demander un entretien contradictoire |
5. Notification des résultats |
Clôture du contrôle avec :
- Absence d’observation ou simple rappel
- Redressement (URSSAF)
- Injonction ou sanction (DREETS)
L’entreprise est informée officiellement de la décision. |
Documents à préparer et à présenter
Lors d’un contrôle URSSAF ou DREETS, la qualité et l’organisation des documents transmis peuvent grandement faciliter le déroulement de l’intervention. Une entreprise bien préparée montre son sérieux et limite les risques de confusion ou de redressement.
La liste exacte peut varier selon l’objet du contrôle, mais certains documents sont systématiquement attendus.
Les incontournables à avoir à jour
Documents relatifs à l’entreprise :
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Extrait Kbis ou attestation d’immatriculation,
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Statuts de l’entreprise (le cas échéant),
-
Livres comptables (grand livre, journal, bilan…),
-
Relevés bancaires.
Registres sociaux et RH :
-
Registre unique du personnel,
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Contrats de travail signés,
-
Fiches de paie des salariés,
-
Déclarations sociales nominatives (DSN),
-
Justificatifs de versement des cotisations URSSAF,
-
Registre des heures (si applicable).
Documents relatifs aux conditions de travail :
-
Affichage obligatoire (durée du travail, consignes de sécurité…),
-
Règlement intérieur (pour les structures concernées),
-
Registre santé et sécurité au travail,
-
Documents de prévention (DUERP : Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels),
-
Attestations de formation sécurité (CACES, habilitations…).
En cas d’activité sur chantier
Si l’entreprise intervient sur des chantiers, les contrôleurs peuvent demander des éléments complémentaires :
-
Planning des équipes,
-
Registre des sous-traitants,
-
Déclarations de détachement de travailleurs étrangers (formulaire SIPSI),
-
Autorisations d’accès aux chantiers,
-
Documents de coordination sécurité et protection de la santé (CSPS).
Il est également utile de pouvoir justifier de
la traçabilité des salariés sur les chantiers (badges, relevés d’heures, feuilles d’émargement…).
Et pour les indépendants ou TPE ?
Les travailleurs non-salariés (artisans, micro-entrepreneurs…) sont aussi soumis à des vérifications, bien que les documents soient plus simples :
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Déclarations de chiffre d’affaires (auto-entrepreneur),
-
Attestation d’affiliation à l’URSSAF,
-
Justificatifs de paiement des cotisations,
-
Factures émises et reçues,
-
Livre des recettes et registre des achats (obligatoires selon le statut).
Les droits et devoirs des professionnels contrôlés
Face à un contrôle URSSAF ou DREETS, les professionnels du bâtiment ne sont pas démunis. La loi encadre strictement les prérogatives des inspecteurs, et garantit aux entreprises un certain nombre de droits. Connaître ces droits permet de mieux se défendre, de faire valoir ses observations, et d’éviter les abus ou malentendus.
Un droit à l’information et à la transparence
Tout au long du contrôle, vous avez le droit :
-
D’être informé de la nature du contrôle (objet, période, portée),
-
D’obtenir l’identité du contrôleur et sa carte professionnelle,
-
De poser des questions sur le déroulement et la procédure,
-
De connaître vos obligations, mais aussi vos droits de recours.
Le contrôleur doit agir de manière loyale, sans chercher à
piéger l’entreprise ni à interpréter abusivement les faits. En cas de doute, il est possible de demander des explications par écrit.
Un droit de réponse et de rectification
Si des irrégularités sont constatées,
vous disposez d’un droit à la défense :
-
Vous pouvez formuler des observations écrites,
-
Solliciter un entretien contradictoire avec le contrôleur,
-
Fournir des justificatifs ou corriger des erreurs matérielles.
Le contrôle ne se termine pas dès les premières conclusions : une phase contradictoire est prévue pour équilibrer les échanges.
Le droit à l’assistance
À tout moment, l’entreprise peut se faire
accompagner par un professionnel :
-
Expert-comptable,
-
Avocat,
-
Organisation professionnelle.
Cet accompagnement est recommandé si le contrôle touche à des domaines sensibles (travail dissimulé, détachement de salariés étrangers, fraude…).
Un droit au respect de la vie privée et du secret professionnel
Les contrôleurs ne peuvent pas :
-
S’introduire dans les domiciles privés sans autorisation,
-
Exiger la remise de documents confidentiels sans lien avec le contrôle,
-
Dépasser le cadre fixé par leur mission.
De leur côté, ils sont tenus à une
obligation de confidentialité sur les informations recueillies.
Un droit à la contestation en cas de litige
En cas de désaccord avec les conclusions du contrôle :
-
Vous pouvez déposer une réclamation ou une contestation écrite,
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Saisir la commission de recours amiable (URSSAF),
-
Ou, si nécessaire, engager un recours devant le tribunal compétent (judiciaire ou administratif selon les cas).
Article rédigé pour Batiactu par Rai d'Action