Publié le 05/05/2025 - Article rédigé pour Batiactu par Rai d'Action
Cadre légal des garanties applicables aux travaux de construction
Avant d'entrer dans le détail des différentes garanties, il est essentiel de comprendre le cadre général dans lequel elles s'inscrivent. Les obligations de garantie sont prévues par le
Code civil, et plus précisément dans les articles 1792 et suivants. Elles s'appliquent automatiquement, sans qu'il soit nécessaire de les mentionner dans le contrat.
Une origine juridique bien définie
Les garanties légales trouvent leur fondement dans la volonté de
protéger le maître d'ouvrage, qu'il s'agisse d'un particulier ou d'un professionnel, face aux malfaçons ou défaillances pouvant apparaître après la réception des travaux.
L'idée est simple : une fois les travaux terminés, le client ne doit pas être seul face à d'éventuels problèmes. C'est pourquoi la loi impose aux constructeurs (et donc aux artisans) des responsabilités précises, en fonction de la nature du désordre et du délai dans lequel il survient.
Ces garanties sont dites
" légales " car elles s'appliquent automatiquement, dès lors qu'il y a un contrat de louage d'ouvrage (un contrat de construction, en d'autres termes).
À quels travaux ces garanties s'appliquent-elles ?
Toutes les interventions ne sont pas concernées au même niveau.
Les garanties légales couvrent :
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Les constructions neuves (maisons individuelles, logements collectifs, bâtiments professionnels…),
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Les travaux de rénovation importants, dès lors qu'ils touchent à la structure du bâtiment ou à ses équipements indissociables,
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Les aménagements extérieurs attenants à l'ouvrage (dans certains cas).
En revanche, les interventions mineures, comme un simple remplacement de robinet ou une peinture intérieure, ne sont
généralement pas soumises à l'ensemble de ces garanties.
Garantie contractuelle vs. garantie légale
Il est utile de distinguer deux types de garanties :
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Les garanties légales (parfait achèvement, biennale, décennale) : elles s'appliquent automatiquement et sont encadrées par la loi.
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Les garanties contractuelles : elles peuvent être ajoutées par le professionnel dans le cadre du contrat (ex : garantie commerciale sur un produit installé, garantie de finition spécifique…). Elles ne remplacent pas les garanties légales, mais peuvent venir les compléter.
Pour l'artisan, il est donc indispensable de connaître les garanties légales auxquelles il est soumis
même en l'absence de clause explicite dans le contrat. Ignorer leur existence ne constitue pas une excuse aux yeux de la loi.
La garantie de parfait achèvement
La garantie de parfait achèvement est prévue à l'article 1792-6 du Code civil. Elle impose à l'artisan de
réparer tous les défauts signalés par le client :
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soit dans le procès-verbal de réception des travaux (sous forme de réserves),
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soit par écrit dans l'année qui suit la réception.
Cette garantie ne fait pas de distinction entre les désordres importants ou mineurs. Même un simple défaut de finition (joints mal réalisés, peinture non uniforme…) peut entrer dans son champ d'application.
Ce que couvre cette garantie
La garantie de parfait achèvement concerne
l'ensemble des travaux réalisés par l'artisan, à l'exception des dégradations causées par une mauvaise utilisation ou un manque d'entretien de la part du client.
Elle couvre notamment :
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Les malfaçons visibles à la réception (ex : carrelage mal posé, plinthes décollées),
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Les désordres apparus dans l'année suivant la réception (ex : fissure, porte qui frotte, volet défectueux),
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Les défauts esthétiques signalés dans le délai d'un an.
Attention : les désordres structurels graves relèvent plutôt de la garantie décennale, mais s'ils sont visibles dès la réception, ils peuvent aussi être intégrés dans la garantie de parfait achèvement.
Une garantie d'un an
La durée de cette garantie est de
12 mois à compter de la date de réception des travaux.
Durant cette période, l'artisan est tenu de réparer tous les désordres signalés, dans un délai raisonnable. En cas de litige ou d'inaction, le maître d'ouvrage peut saisir la justice pour forcer l'artisan à intervenir, voire demander l'exécution des travaux aux frais d'un tiers.
Obligations de l'artisan
Pour se conformer à cette garantie, l'artisan doit :
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Accepter et corriger les désordres légitimes signalés par le client,
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Intervenir rapidement après signalement,
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Ne pas négliger les réserves émises lors de la réception des travaux.
Il est recommandé de
documenter la réception par écrit, idéalement à travers un procès-verbal signé par les deux parties. Cela permet de dater précisément le début du délai d'un an.
La garantie biennale ou de bon fonctionnement
Prévue à l'article 1792-3 du Code civil, la garantie biennale impose à l'artisan d'assurer le
bon fonctionnement des éléments dissociables de l'ouvrage pendant
deux ans à compter de la réception des travaux.
On parle ici d'éléments qui ne participent pas à la solidité de l'ouvrage, mais qui en assurent le confort, l'usage ou l'esthétique.
Quels équipements sont concernés ?
Cette garantie s'applique à une large gamme d'éléments, à condition qu'ils soient
posés par l'artisan dans le cadre du contrat initial. Quelques exemples :
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Portes intérieures, volets, fenêtres (quand ils ne participent pas à la structure),
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Robinetterie, sanitaires, ballons d'eau chaude,
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Interrupteurs, prises électriques, interphones,
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Chaudières, radiateurs, thermostats,
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Parquets flottants, moquettes, carrelages collés (dans certains cas),
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Mécanismes de ventilation, motorisation de portails ou de volets…
Attention : les désordres doivent concerner le fonctionnement de l'équipement, pas son esthétique ou une mauvaise utilisation.
Une durée de deux ans
La garantie court sur
24 mois à compter de la date de réception des travaux. Elle est
automatique et ne nécessite aucune mention particulière dans le contrat.
Pendant cette période, le client peut exiger le remplacement ou la réparation des éléments défectueux. L'artisan doit donc être en mesure d'intervenir rapidement ou de justifier que le problème ne relève pas de sa responsabilité (ex : usage inadapté, pièce d'usure, défaut d'entretien…).
Ce que doit faire l'artisan
Pour se prémunir de tout litige, l'artisan peut :
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Conserver les documents liés à l'installation des équipements (fiches techniques, notices, garanties fabricant),
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Informer le client sur l'entretien à prévoir,
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Vérifier le bon fonctionnement à la réception des travaux,
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Répondre aux demandes dans les délais impartis.
Il est également conseillé d'intégrer une
notice d'entretien pour certains équipements sensibles (chaudière, VMC, etc.), afin de bien cadrer la responsabilité de chacun.
La garantie décennale : la plus engageante
La garantie décennale est encadrée par les articles 1792 et suivants du Code civil. Elle s'applique
de plein droit, sans qu'il soit besoin de la stipuler dans le contrat.
Elle impose au constructeur (maître d'œuvre, entreprise, artisan, architecte…) de réparer les dommages
graves affectant l'ouvrage dans un délai de dix ans à compter de sa réception.
Ce que couvre cette garantie
Les désordres concernés sont ceux qui :
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Portent atteinte à la solidité de l'ouvrage (ex : affaissement de plancher, fissures structurelles, effondrement partiel),
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Rendent l'ouvrage impropre à sa destination (ex : infiltration majeure d'eau, isolation thermique défaillante, installation électrique rendant un bâtiment inutilisable),
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Affectent des éléments d'équipement indissociables de l'ouvrage (ex : plancher chauffant intégré dans la dalle, toiture-terrasse étanche, canalisations encastrées…).
Voici quelques exemples concrets associés à la garantie dont le problème relève :
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Un toit qui fuit sur une maison neuve → garantie décennale.
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Une VMC tombée en panne → garantie biennale.
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Une peinture écaillée → parfait achèvement (si signalé dans l'année).
Travaux concernés par la décennale
La garantie décennale s'applique aux
ouvrages de bâtiment et aux travaux de rénovation
lourde.
Sont notamment concernés :
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La construction d'une maison individuelle ou d'un immeuble,
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L'extension d'un bâtiment existant,
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La réhabilitation de structures porteuses,
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Les travaux de gros œuvre (fondations, charpente, maçonnerie…),
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L'étanchéité et l'isolation intégrée à l'ouvrage.
Les petits travaux ou réparations sans impact structurel ne relèvent pas de cette garantie.
Une obligation d'assurance incontournable
Toute entreprise ou artisan intervenant dans le bâtiment doit
obligatoirement souscrire une assurance responsabilité civile décennale avant d'ouvrir un chantier.
Cette assurance permet de couvrir les réparations des dommages entrant dans le cadre de la garantie, sans mettre en péril la trésorerie de l'entreprise.
L'artisan doit également remettre à son client une
attestation d'assurance décennale en cours de validité, mentionnant les activités garanties. C'est une formalité souvent exigée pour l'obtention du permis de construire ou lors de la réception.
Ne pas être assuré expose l'artisan à des
sanctions pénales (jusqu'à 75 000 € d'amende et 6 mois de prison), mais surtout à devoir
réparer les dommages à ses frais.
Cela peut représenter des sommes très importantes en cas de sinistre majeur (effondrement, incendie, infiltration généralisée…).
Article rédigé pour Batiactu par Rai d'Action.