Publié le 10/09/2025 - Article rédigé pour Batiactu par Rai d'Action
Pourquoi la traçabilité documentaire est incontournable en 2025
La traçabilité documentaire n’est plus une simple formalité administrative. Elle est désormais
au cœur des obligations légales imposées par le Code de la construction et de l’habitation (CCH). En 2025, plusieurs évolutions réglementaires viennent confirmer cette tendance, avec un objectif clair : garantir la qualité, la sécurité et la conformité des ouvrages.
Une obligation légale renforcée
Depuis quelques années, les textes législatifs et réglementaires multiplient les exigences en matière de documentation. Le Code de la construction prévoit que tout professionnel du bâtiment doit pouvoir
justifier à tout moment de la conformité des matériaux, des équipements et des procédés utilisés. Cette obligation s’applique aussi bien aux entreprises générales qu’aux artisans travaillant sur des lots spécifiques (plomberie, électricité, isolation, etc.).
Les réglementations environnementales et énergétiques, comme la
RE2020, ont également renforcé la nécessité de fournir des
preuves tangibles : attestations de performance énergétique, certificats de conformité, documents relatifs à la gestion des déchets de chantier, etc.
Les objectifs : sécurité, conformité et responsabilité
Cette traçabilité répond à plusieurs enjeux majeurs :
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Sécurité des occupants : en cas d’incident, les autorités doivent pouvoir retracer la provenance et les caractéristiques des matériaux utilisés.
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Conformité réglementaire : elle garantit que le chantier respecte les normes en vigueur (énergie, acoustique, accessibilité, etc.).
-
Responsabilité juridique : en cas de litige ou de sinistre, la documentation permet de prouver la bonne exécution des travaux.
En clair, un dossier incomplet peut rapidement se transformer en un risque financier et juridique important.
Les évolutions récentes qui changent la donne
Plusieurs textes récents renforcent la nécessité d’une traçabilité irréprochable :
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RE2020 : impose la justification des performances énergétiques et environnementales des bâtiments neufs.
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Loi Anti-gaspillage (AGEC) : obligation de prouver la valorisation des déchets de chantier et l’utilisation éventuelle de matériaux recyclés.
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Réglementation incendie et sécurité : exigence accrue en matière de certificats et notices techniques pour certains matériaux.
Ces obligations s’appliquent dès la phase de conception et se poursuivent jusqu’à la réception des travaux, voire pendant la durée de la responsabilité décennale.
Tour d’horizon des documents devant être tracés et conservés
Le Code de la construction impose aux professionnels du bâtiment de constituer
un dossier documentaire complet pour chaque chantier. Ce dossier regroupe des documents techniques, réglementaires et environnementaux. Pour y voir plus clair, voici une synthèse des pièces essentielles :
Catégorie |
Exemples de documents |
Objectif principal |
Techniques |
Plans d’exécution, schémas, études préalables, fiches techniques, PV de contrôle (étanchéité, acoustique) |
Prouver la conformité aux règles de l’art et aux normes techniques |
Réglementaires |
Attestation d’assurance décennale, certificats de conformité (CE, NF), procès-verbaux de réception, attestations sécurité (plomb, amiante) |
Répondre aux obligations légales et contractuelles |
Environnementaux et énergétiques |
Certificats d’efficacité énergétique, justificatifs RE2020, bordereaux de suivi des déchets (BSD), preuve d’utilisation de matériaux recyclés ou biosourcés |
Assurer la conformité aux normes environnementales et à la RE2020 |
Ces documents ne sont pas optionnels : ils conditionnent la conformité du chantier et la responsabilité de l’artisan.
Durée de conservation
La règle est claire : la plupart des documents doivent être conservés
au moins 10 ans, en lien avec la garantie décennale. Certains justificatifs, comme ceux relatifs à la gestion des déchets, peuvent faire l’objet de contrôles ponctuels plusieurs années après la réception des travaux.
En pratique, un artisan doit prévoir une organisation de classement solide, qu’elle soit physique ou numérique, afin de répondre rapidement en cas de demande des autorités ou de litige.
Quels outils pour assurer une traçabilité efficace ?
Avec l’augmentation des obligations réglementaires, la gestion documentaire manuelle devient rapidement ingérable, surtout pour les artisans qui interviennent sur plusieurs chantiers.
Les outils numériques sont aujourd’hui incontournables pour centraliser, sécuriser et partager les informations en temps réel.
Les solutions numériques : GED et plateformes collaboratives
La
Gestion Électronique des Documents (GED) est l’un des moyens les plus fiables pour structurer la traçabilité. Ces systèmes permettent de :
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Stocker et classer automatiquement les documents par chantier, type de pièce ou date ;
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Garantir l’intégrité et la sécurité des fichiers, grâce à des sauvegardes régulières ;
-
Faciliter la recherche rapide en cas de contrôle ou de litige.
Des plateformes collaboratives (comme Procore, Finalcad ou Bulldozair) offrent en plus la possibilité de partager ces documents avec le maître d’ouvrage, le bureau d’études ou le contrôleur technique, tout en gardant une trace des échanges.
Le rôle du BIM et de la digitalisation des chantiers
Le
Building Information Modeling (BIM), bien que surtout utilisé sur les projets d’envergure, commence à se démocratiser pour les PME et artisans spécialisés.
Grâce au BIM, la documentation est intégrée directement à la maquette numérique du bâtiment. Chaque composant (matériau, équipement, système) peut être relié à ses certificats et fiches techniques, ce qui facilite la traçabilité sur toute la durée de vie de l’ouvrage.
Applications mobiles pour le suivi sur chantier
Pour les artisans, les applications mobiles constituent un outil pratique au quotidien.
Elles permettent de :
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Photographier et archiver en temps réel les livraisons, certificats et contrôles ;
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Remplir des formulaires directement sur site (réceptions, attestations) ;
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Synchroniser automatiquement les données avec le bureau ou le cloud, évitant ainsi la perte de documents papier.
Critères de choix d’un bon outil
Avant de s’équiper, il est essentiel de vérifier que la solution choisie :
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Respecte le RGPD et garantit la confidentialité des données ;
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Offre une sauvegarde sécurisée (cloud certifié, hébergement en France ou Europe) ;
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Reste accessible sans connexion permanente (mode hors ligne pour les chantiers isolés) ;
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Propose une ergonomie simple, adaptée à un artisan ou une petite équipe.
Les risques en cas de manquement à la traçabilité
Ne pas assurer correctement la traçabilité documentaire d’un chantier peut avoir
des conséquences lourdes, tant sur le plan juridique que financier. En 2025, les contrôles sont renforcés et les maîtres d’ouvrage comme les assureurs se montrent de plus en plus exigeants.
Des sanctions légales et financières
L’absence de documents obligatoires constitue une
non-conformité réglementaire. Selon le type de manquement, un artisan peut être exposé à :
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Des amendes administratives en cas de non-respect des obligations issues du Code de la construction ou des réglementations environnementales (par exemple, la loi AGEC) ;
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Une suspension de chantier décidée par l’inspection du travail ou la DREAL en cas de non-présentation des justificatifs demandés ;
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Des pénalités contractuelles si le marché prévoit la remise d’un dossier complet avant réception.
En cas de fraude avérée (falsification ou dissimulation), les sanctions peuvent aller jusqu’à des
poursuites pénales.
Un risque majeur en cas de litige ou de sinistre
En l’absence de pièces justificatives,
la responsabilité de l’artisan peut être engagée en cas de défaut constaté après la livraison. Sans preuves de conformité :
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L’assureur peut refuser la prise en charge au titre de la garantie décennale ;
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Le client peut exiger des réparations à la charge de l’artisan, voire engager des actions en justice ;
-
Dans les cas extrêmes, les dommages et intérêts peuvent représenter plusieurs dizaines de milliers d’euros.
Un exemple concret : un défaut d’étanchéité signalé deux ans après la réception. Si l’artisan ne peut pas fournir les procès-verbaux de test ni les certificats des matériaux utilisés, il devra
assumer la réparation intégrale.
Un impact sur la réputation professionnelle
Au-delà des sanctions, un manque de rigueur documentaire peut ternir l’image d’un artisan. Un maître d’ouvrage ou un architecte insatisfait
peut écarter l’entreprise de futurs marchés. À l’inverse, la capacité à présenter un dossier complet est souvent perçue comme un gage de professionnalisme et de sérieux.
Bonnes pratiques pour une traçabilité sans faille
Mettre en place un système de traçabilité efficace ne s’improvise pas. Cela demande une organisation rigoureuse, des outils adaptés et une implication continue à chaque étape du chantier.
Voici les recommandations clés :
Axe |
Actions concrètes |
Organisation interne |
Définir les responsabilités (qui collecte, qui valide), créer un référentiel ou guide interne pour standardiser les pratiques. |
Digitalisation |
Adopter une solution GED ou une application mobile pour centraliser les documents, limiter les pertes et faciliter le partage. |
Anticipation |
Archiver chaque document dès sa production, programmer des vérifications régulières, réaliser un audit avant la livraison. |
Formation |
Sensibiliser les équipes à l’importance de la traçabilité, former à l’utilisation des outils numériques et aux bonnes pratiques. |
Ces actions simples réduisent considérablement le risque d’oubli et facilitent la réponse en cas de contrôle ou de litige.
Article rédigé pour Batiactu par Rai d'Action.